RENCONTRE AVEC ANDRE DE PERETTI

Publié le 14 Février 2016

RENCONTRE AVEC ANDRE DE PERETTI

RENCONTRE AVEC ANDRE DE PERETTI :

la résistance par l’humour

Ce vendredi 22 janvier 2016, sous une averse qui nous trempe en moins de deux, nous traversons Paris pour nous rendre à l’invitation d’André DE PERETTI, dans son appartement Parisien.

Nous sommes trois à avoir cet honneur : Brigitte LIATARD, co-fondatrice avec Babeth DIAZ de la médiation par les pairs en France et secrétaire de l’association Medi’Acteurs Nouvelle Génération dont André DE PERETTI est le président d’honneur ; Florence, une jeune étudiante en service civique auprès des jeunes en situation de décrochage scolaire et moi, Anne, formatrice de l’association et référente médiation du collège Saint Exupéry de CHAUMONT-EN-VEXIN.

André DE PERETTI est la coqueluche de nos jeunes qui ont chaque année, le plaisir de partager avec lui les temps forts des rencontres des médiateurs de BOBIGNY.

En juin dernier, nous étions 360 à fêter avec lui son entrée dans sa centième année …C’est dire si ce polytechnicien, pédagogue, très impliqué dans la vie politique, psychosociologue et écrivain français a de choses à raconter de sa vie trépidante.

Ce qui nous conduit vers lui aujourd’hui, c’est notre projet de l’année : « M comme Mémoire et Emotions ». C’est un titre qui lui va comme un gant, lui qui possède une mémoire infinie et qui a ce don particulier de la partager en suscitant dans son public des émotions multiples et bienfaisantes.

La décision de faire un recueil de ce projet a tout de suite été suivie d’une évidence : que celui-ci soit préfacé par André DE PERETTI.

La requête à peine formulée, le voila qui prend sa plume et commence ainsi :

« Chers Compagnons,

Vous voila réunis une nouvelle fois pour rendre compte d’une expérience que vous êtes en train de faire(…..). Ce travail de mémoire doit vous permettre, je l’espère vivement, d’aborder les temps présents avec vigueur et justice (…). Puis-je encore vous redire que (…) l’optimisme doit être votre manière de vivre, comme une vraie résistance, à cultiver jour après jour, dans l’authentique sentiment que la Vie est belle (…) ».

Et de conclure d’un « hourrah ! » suivi de sa signature.

Le ton est donné et les jeunes s’y retrouveront, eux qui chaque année se nourrissent et se régalent de cette conclusion à la traditionnelle élocution d’André DE PERETTI lors de la rencontre annuelle de Bobigny.

Interrogé sur les souvenirs de sa longue captivité (de 1940 à 1945) pendant la seconde guerre mondiale, il raconte avec humour des anecdotes qui sont autant de faits de résistances pacifiques.

Ainsi, nous raconte –il le difficile combat contre les puces qui dans le noir, étaient à craindre d’avantage que les raids aériens des bombardiers anglo-américains. Avec ses camarades, ils redoublaient de créativité acrobatique pour les attraper et n’avaient d’autres ressources que de les manger pour s’en débarrasser. Mais, ajoute t-il avec humour, on pouvait recracher si on voulait.

Il a, durant sa captivité, écrit une pièce, « la légende du chevalier » qui a été jouée dans différents camps dès 1941 devant des milliers de détenus et en 1943, alors qu’il était toujours en captivité, à la comédie française sous la direction de Julien BERTHEAU au nez et à la barbe des Allemands.

Cette pièce de théâtre dont la morale pourrait se résumer ainsi : « Il n’y a qu’une seule défaite, c’est de devenir semblable à son adversaire », fait partie des actes de résistance par la culture que l’on retrouve dans les témoignages de rescapés de différents camps.

Jeune et impétueux, il a, à de nombreuses occasions, usé de l’humour pour se sortir de situations difficiles. Ainsi, puni pour avoir utilisé de la nourriture (de la graisse ?) pour s’éclairer d’une flamme afin de poursuivre le soir l’écriture de sa pièce, il avait ordre de parcourir le camp chargé de son lourd sac à dos, jusqu’à épuisement. Il vide alors le contenu de celui-ci qu’il distribue à ses camarades et le rempli à la place de papier toilette, dont il entoure par ailleurs son sac. Il arrive ainsi à l’appel, affublé de son fardeau grotesque, ce qui créé un fou rire dans les rangs, qui se propage jusqu’au capitaine : il a été exempté de sa punition et a pu récupérer ses affaires. « C’était quitte ou double, nous dit-il, mais ça valait le coup de le tenter ».

« L’humour, poursuit-il, est une magnifique forme de résistance. Mais les Français n’aiment pas l’humour. Ils préfèrent user de l’ironie inventée par Voltaire. »

Et de conclure :

« L’humour est juif. Beaucoup de textes juifs ne sont pas compréhensibles s’ils ne sont pas passés au filtre de l’humour. Le manque d'humour a fait, et fait beaucoup de dégâts en particulier dans le cadre des religions. »

Nous avons du mal à le quitter et rions encore une bonne heure de ses savoureuses anecdotes avant de prendre congés, conscients d’avoir vécu là un moment unique avec un grand personnage de l’histoire, mais surtout et avant tout de notre humanité, lui qui s’adresse à des jeunes en les appelant « mes compagnons ». Il nous appartient de partager cet échange avec le plus grand nombre.

C’est chose faite.

Rédigé par Memoires&eMotions

Publié dans #PROJET

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